Ces ingérences qui ne dérangent pas...


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Article N°27630

Ces ingérences qui ne dérangent pas...

On parle beaucoup d'ingérences étrangères dans notre politique nationale, notre économie et technologie. Il me semble souvent que le prisme utilisé pour les reporter est hémiplégique et n'accepte de ne regarder qu'un certain type d'ingérences...
Il en est de nombreuses que je ne listerais pas toutes dans cet article, mais je mettrais l'accent sur une en particulier dont les effets se font sentir significativement, et qui nous empêche d'affronter un certains nombres de défis géopolitiques, mais aussi sociétaux avec le bonnes grilles de lecture et donc nous empêche de prendre les bonnes décisions.
Dans les exemples que je vais vous donner, si la Russie ou la Chine en avait fait la moitié du quart, cela aurait fait scandale... Mais là silence radio...
Et vous qu'en pensez-vous?

Avec la guerre en Ukraine et les élections de 2022, le thème de l’ingérence étrangère dans la politique nationale a fait parler d’elle. Une commission d’enquête a même été nommée afin d’en déterminer l’ampleur (Travaux parlementaires). Bien entendu, ce qui est visé, ce sont les ingérences étrangères de la Russie et de la Chine principalement, parce qu’à tort ou à raison ce sont celles qui sont vues comme les plus dangereuses.
Il existe toutefois de nombreuses autres ingérences toutes aussi problématiques, certaines que l’on ne veut pas voir en face pour des raisons idéologiques et pour éviter de « stigmatiser » une partie de la population du territoire français. Il s’agit des ingérences par exemple de la Turquie et de l’Algérie au travers de leur diaspora, mais aussi par l’utilisation d’Imams formés dans leur pays et valorisant leur vision culturelle et géopolitique. D’ailleurs Erdogan le président Turc a été condamné pour incitation à la haine en 1998 pour avoir utilisé ces vers belliqueux et religieux « Les minarets seront nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées seront nos casernes et les croyants nos soldats ». Il s’adressait à la Turquie à cette époque, mais il ne faut pas oublier qu’il est aussi très lié aux frères musulmans (Le Point 28 janvier 22) et que nombre de mosquées en France sont soutenues financièrement et gérées par des organisations turques. L’Algérie n’est pas en reste, y compris dans la gestion et la tenue idéologique d’une autre partie des mosquées en France De plus son président appelle ses ressortissants à ne pas s’intégrer ou pire s’assimiler… Bizarrement ces ingérences ne suscitent aucune réaction de la part de notre gouvernement, ni de sanctions et pourtant le danger est concret et les dernières émeutes ne démentent pour le moins pas ce risque immense de déstabilisation de notre pays.
Il y a bien entendu nombre d’autres ingérences de pays alliés ou ennemis. Nous rappellerons que par exemple l’Allemagne a une politique d’ingérence (article) forte sur le champ économique. Elle a participé activement au saccage de notre filière d’excellence qu’est le nucléaire et fait tout son possible pour que nous n’arrivions pas à reprendre un leadership fort dans ce domaine, l’objectif étant d’empêcher la France de retrouver un avantage compétitif industriel fort et incontestable.


Cependant il est une ingérence profonde, qui porte sur tous les axes géopolitique, industriel, économique et culturel dont on ne parle pas. Pourquoi, tout simplement parce que notre vassalisation à cette puissance étrangère est quasi complète et que la plupart de nos outils politiques et culturels, qui auraient pu nous être utiles, ont été savamment sabotés. Quelle est cette puissance étrangère, vous l’avez probablement deviné, il s’agit des États-Unis.
Notre relation avec ce pays longtemps considéré comme ami, mais surtout allié remonte à bien longtemps, un temps où les États-Unis d’Amérique n’en était encore qu’au balbutiement de leur histoire et où les trois grandes puissances européennes qui dominaient le monde étaient L’Angleterre, la France et en troisième position l’Allemagne La colonisation telle que pratiquée par certains états européens n’était que l’expression impériale de cette volonté de puissance. Dès le début du XXe siècle les États-Unis d’Amérique avaient l’ambition de devenir une puissance mondiale supplantant les puissances européennes. Sa gestion habile de son intervention dans les deux conflits mondiaux, lui a permis de devenir la première puissance militaro-industrielle et géopolitique mondiale. Puis en 1971 en découplant le Dollar de l’or et en utilisant sa monnaie comme une arme, ils ont parachevé leur domination mondiale en étant le centre monétaire et financier du monde. Pour mémoire l’ensemble des pays et donc leurs populations permettent à la population américaine de vivre dans une opulence économique au prix d’une dette abyssale (celle de la France fait pâle figure), et ceux qui doivent la rembourser au prix de nombreux sacrifices sont le reste de la population mondiale…
Si les États-Unis n’hésitent pas à utiliser tous les leviers d’ingérence possibles partout dans le monde de façon plus ou moins visible pour asseoir leur domination et défendre leurs intérêts, qu’en est-il pour le cas particulier de la France et pourquoi j’émets l’hypothèse forte que nous sommes dans un état de vassalisation avancée.
Cette affirmation de ma part repose sur plusieurs éléments qui mettent en jeux plusieurs outils de la puissance américaine :
  • les organes d’espionnages utilisés à des fins de guerre économique
  • les lois extra-territoriales
  • les embargos
  • les outils d’influence ou de « softpower » :
  • La submersion culturelle par différent biais dont le cinéma
  • Le numérique, nouvel outil de puissance


La guerre économique qui nous est menée par les États-Unis est grandement facilitée par leurs lois extra-territoriales et surtout par leur capacité à les mettre en œuvre. La meilleure illustration de cette arme a été démontrée lors de deux affaires majeures, l’affaire Alstom (Dossier Alstom – Mediapart 2019) qui s’est soldée par le rachat de la branche stratégique des turbines par General Electrics, et l’affaire Airbus, qui grâce à une meilleure réactivité de la direction et des pouvoirs publics a permis d’éviter le pire (Arte – replay). Ces deux affaires sont les plus emblématiques de la façon dont les US utilisent leurs lois (extraterritoriales) dans un but de guerre économique appuyée par les agences gouvernementales comme le FBI ou les agences de renseignement. Si nous regardons la liste des entreprises condamnées par le DOJ (Department of Justice) on s’aperçoit qu’elle comporte une majorité d’entreprises européennes, avec en pole position les entreprises françaises qui ont écopé des amendes les plus lourdes. Seules une ou deux sociétés américaines ont été touchées et faiblement condamnées…
Mais ce ne sont pas les seuls outils dont disposent les US pour asseoir petit-à-petit leur domination politique sur notre pays ou plus exactement sur ce qu’ils considèrent comme leur territoire d’influence ou terrain de jeu. Il existe des alliances géopolitiques concernant le renseignement qui instaurent une séparation entre les pays anglo-saxons et les autres, par exemple le five eyes (FVEY). Nos déboires sur l’histoire des sous-marins australiens, peut s’expliquer en partie par cette alliance qui exclue des acteurs non anglo-saxon. Là encore ce sont des leviers qui nous font mal, mais celui-là est presque un outil du jeu normal de puissance.


Il est vaste panel d’outils plus insidieux, communément appelés « softpower ». Mentionnons l’utilisation du cinéma pour promouvoir les valeurs américaines et qui souvent permet de réécrire l’histoire sous l’angle qui les arrange, comme dans « Master & commander » qui inverse les rôles entre les britanniques et les français… Nous avons aussi le cas de « Kingdom of Heaven » qui réécrit l’histoire des croisades et offre une description plus qu’approximative sur le rôle des Templiers… Ce ne sont que quelques exemples, et l’on pourrait ainsi analyser l’ensemble de l’œuvre cinématographique américaine comme arme de propagande massive. Le dernier exemple en date « Black Panther – Wakanda forever » qui a fini par faire réagir notre ministre de la défense, mettait en scène des mercenaires qui ressemblaient à s’y méprendre à des militaires français et cela, à un moment où l’influence de la France en Afrique est remise en cause, et qu’en dehors des Russes et des Chinois, les américains ont aussi des visées sur le continent et comme les deux autres aucun un intérêt pour les populations locales.
Autre élément de l’arsenal soft power, utilisés par les américains pour nous attirer et nous maintenir dans leur giron mentionnons le programme Young Leader de la fondation Franco-Américaine (Historique des promotions). Ce programme a pour objectif de faire suivre un cursus à de jeunes politiques, fonctionnaires, avocats, journalistes, médecins etc. identifiés comme prometteurs pour créer des liens, voire des complicités avec leurs homologues américains. Dans les personnalités emblématiques, nous avons :
  • Promotion 2020, Jean-Noël Barrot actuel ministre du numérique et des télécommunications,
  • Promotion 2019, Amélie de Montchalin qui a été elle aussi ministre sous Macron.
  • Promotion 2017 nous avons Thomas Pesquet l’astronaute préféré des français,
  • Promotion 2012 nous avons Emmanuel Macron,
  • Promotion 2008 Pierre Kosciusko-Morizet,
  • Promotion 2005 Nathalie Kosciusko-Morizet, Emmanuelle Mignon (ancienne conseillère de N. Sarkozy),
  • Promotion 2002 Jean-Marc Jancovici et Valérie Pécresse,
  • Promotion 1984 Alain Minc,
  • Promotion1983 Christine Okrent.
Il y en a bien d’autres, et la question que l’on est en droit de se poser, c’est un politique est-il crédible quand il parle de souveraineté alors qu’il a été biberonné à la façon de penser américaine, qu’il est en contact avec des responsables de l’administration américaine ou d’acteurs économiques clés ? Ne sont-ils pas sous influence volontaire ou involontaire ? Cela en plus de l’entrisme de la culture américaine qui petit à petit remplace nos références culturelles, sur quelle pente cela nous mène-il? Qui reste t-il pour faire entendre la voix singulière de la France si nos élites sont sous influence ?
Mais cela ne s’arrête pas là ! Nos américains s’invitent dans nos banlieues, sélectionnent des jeunes qu’ils jugent prometteurs, comme en 2010 Rokhaya Diallo sélectionnée pour le programme des visiteurs internationaux. Ces jeunes sont ensuite imprégnés par la culture américaine et surtout la grille de lecture sociologique américaine notamment sur les questions du racisme systémique ou du wokisme. Il est bon de rappeler, même si nos médias ont tendance à l’oublier, que la France n’est pas l’Amérique ! Malgré notre passé colonial et ses zones d’ombres indéniables, il n’y a pas de racisme systémique en France, il suffit de se rappeler des témoignages apportées par les GI noirs américains après le débarquement en Normandie. Il serait bon de se rappeler que nombre d’artistes noir-américains du Jazz notamment ont élu domicile en France pour échapper au racisme systémique de leur pays. Il est bon de rappeler qu’il n’ a jamais eu d’apartheid en France ! Il est bon de rappeler, que bien avant les américains, nous avons eu des personnalités politiques de haut niveau dans nos gouvernements comme Blaise Diagne premier député d’origine africaine (en 1914), Gaston Monnerville, George Pau-Langevin, plus récemment nous avons eu Rama Yade, ou Fleur Pellerin, ChristianeTaubira, et dernièrement Pap Ndyiaye, ce ne sont que quelques exemples, mais il démontrent que la France n’a jamais été un pays ou le racisme est systémique. Doit-on expliquer encore et encore qu’il peut y avoir des personnes racistes mais il n’y a pas de racisme systémique en France !
Ceci illustre le danger de cette grille de lecture américaine qui nous est imposée.


Le dernier outil de conditionnement et d’impérialisme massif est le numérique qui dès les origines a été vu et penser comme un nouveau territoire où imposer sa supprématie. En effet, les américains ont compris très vite très tôt le formidable outil de puissance que représentait le numérique et bien entendu l’ensemble des technologies sous-jacentes comme les télécommunications et l’informatique. Leur maîtrise qui était jusque-là incontestée tant sur le matériel que sur le logiciel leur permettait des facilités dans l’espionnage. Avec la révolution imposée par l’arrivée des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter, ils peuvent désormais imposer leur vision du monde consumériste, mais aussi leur culture très violente par le biais de la musique et des clips. La quasi inexistence d’une vraie modération sur ces plateformes, le fait que dans le monde occidental pour le moins, les frontières n’y existent pas, impose de fait la vision américaine et le droit américain.
Il est donc temps, s’il n’est pas déjà trop tard de s’interroger sur cette ingérence en particulier, sans bien entendu oublier les autres. Doit-on continuer de subir ce diktat de la vassalisation ? La voix singulière de la France va-t-elle finir par s’éteindre ? A chacun de nous à ouvrir les yeux, à reprendre corps avec notre histoire, à ne pas accepter sans esprit critique les grilles de lectures des événements tels que l’on voudrait nous les imposer ! Reprenons la maîtrise de notre belle langue, cesser ces anglicismes qui l’appauvrissent. Plus le langage s’appauvrit, plus la pensée s’appauvrit, et seule la violence reste pour exprimer ce que l’on ressent ! Ne pensez-vous pas qu’il est temps de sortir de notre léthargie ?






@copyright Effisyn SDS 2023

Emmanuel MAWET

Lien :https://effisyn-sds.com/2023/07/12/ces-ingerences-qui-ne-derangent-pas/

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  • JJUG :19/08/2023 17:11:11 Article très fouillé, avec de nombreux rappels factuels,
    qui pose quantité de questions sur le sens qu'il faut donner au mot "souveraineté" largement mis en avant par nos politiques.
    Il est vrai que, comme Robert Beauvais nous le dit dans son livre de 1970 "L'hexagonal tel qu'on le parle"
    "Il y a souvent dichotomie entre le "logos" et la "praxis" ! "

    Nous tromperaient-ils ? Espérons qu'Abraham Lincoln ait raison :
    « On peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps.»



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