Dans ce nouvel article publié en exclusivité sur Effisyn SDS, et que je vous partage ici sur #smartrezo, nous entraine dans des abîmes de perplexité notamment sur les liens troubles entre notre président et #Qwant... Devant la faillite technologique qui au regard des éléments apportés est patente, et cela fait saigner mon coeur d'ardent défenseur de la #SouverainetéNumérique, se pose la question de l'utilisation des fonds publics. Dans la droite ligne du scandale #McKinsey, on est effaré par les dérives de nos élus et de notre gouvernement...
Pour ceux qui désirent avoir accès au document source (pdf de 219 pages), il faudra vous rendre sur le site original de la publication de cet article!
Bien que fervent défenseur de la souveraineté numérique et utilisateur du moteur de recherche Qwant, de récents éléments d’information viennent bousculer mes certitudes tant technologiques qu’éthiques quant à son intérêt, son coût et son utilité pour la collectivité nationale. En effet, Qwant est en réalité au bord du gouffre financier et il me semble urgent de se demander pourquoi et comment cette entreprise en est arrivée là.
Je rappelle que Qwant est un moteur de recherche français, lancé en 2013, qui propose de ne pas tracer ses utilisateurs, ni vendre leurs données personnelles pour protéger et garantir leur vie privée, et qui se veut neutre dans l'affichage de ses résultats.
La récente affaire des cabinets de conseils en général et celle de McKinsey en particulier, mise en lumière par une enquête sénatoriale exhaustive et rigoureuse, a montré que le bon usage des finances publiques était un concept fluctuant, soumis aux appréciations politiques les plus fantaisistes et qui ne s’épargne pas de basiques questions de copinage et de partage du gâteau sur le dos des contribuables.
Bien sûr, le contexte politique préélectoral nous rappelle que le lancer de boules puantes est de retour. Mais la campagne politique en cours est aussi là pour nous inciter à nous interroger sérieusement sur les politiques publiques menées depuis une décennie, à se poser les bonnes questions quant au bon usage des deniers publics et, dans le cas de Qwant, à nous demander si nous ne sommes pas là aussi à la veille d’un nouveau scandale budgétaire et politique de grande envergure.
Ce sont ces interrogations que je souhaite aujourd’hui partager avec vous, en soumettant à votre libre appréciation un certain nombre d’éléments factuels qui sont publiquement disponibles et qui en disent long sur une certaine incapacité française à passer d’une bonne idée à une réussite industrielle et technologique.
Qwant face à son mythe fondateur
Quoi de plus séduisant qu’une équipe française mettant au point un moteur de recherche français, soucieux de nos données personnelles, témoignant d’une volonté de créer une vraie souveraineté numérique dégagée de l’influence américaine et qui pourrait concurrencer Google sur son principal créneau ? L’affiche était alléchante, mais en réalité, dès son lancement, Qwant s’est appuyé sur les technologies du groupe Microsoft pour exister. Dès 2013, un blogueur anonyme, se présentant sous le pseudonyme de Lucien Théodore, a découvert de troublantes similitudes entre les résultats de Qwant et ceux de Bing, qui est le moteur de recherche de Microsoft. Voulant corriger le tir, les créateurs de Qwant ont reconnu utiliser des interfaces de programmation de Bing, pour ensuite basculer sur leur propre indexation, complétée par d'autres sources.
L’équipe de Qwant expliquait alors qu’une partie seulement des recherches s’appuyaient sur le moteur Bing de Microsoft, mais qu’une grande majorité venait de leurs propres crawlers développés en interne.
C’est pourtant ce moteur de recherche imparfait qui a été imposé à l’ensemble des administrations françaises, alors qu’il n’est qu’un métamoteur utilisant quasi uniquement l’API de Bing. Ce péché structurel a facilement été révélé par des experts comme Olivier Andrieu qui, en 2019-2020, lors d’un concours organisé par Qwant même. Il a pu démontrer, en ayant interdit les robots Bing sur certaines pages utilisées dans le test, que c’était bien les crawlers Bing qui étaient sollicités et non des crawlers spécifiques Qwant. D’une certaine manière, Qwant était un peu le Bernard Madoff du moteur de recherche ; une forme de pyramide de Ponzi du pauvre malgré tout qui voulait nous faire croire que sa technologie n’avait rien à voir avec celles des GAFAM.
Bien évidemment, l’astuce n’a pas échappé aux services de l’Etat, à l’origine de la création de Qwant, et cette forte dépendance au groupe Microsoft a bien été mise en lumière par la Direction Interministérielle du numérique (acteurspublics.fr) dans une note confidentielle que Cédric O, Secrétaire d’Etat au numérique, s’est empressé d’oublier de publier dans son intégralité comme il s’y était pourtant engagé (Le MediaTV).
L’excuse officielle était que Qwant n’était toujours qu’un prototype et qu’une nouvelle version devait arriver rapidement, a priori en mai 2020. Or, en avril 2022, ce n’est toujours pas le cas. Sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
Telle la réforme des marchés publics en Italie du sud, la refonte de Qwant serait toujours en cours (WeDemain.fr) et le seul point positif tenait au versant technique ; ce moteur de recherche, s’il n’est pas souverain, protégeait néanmoins la vie privée des internautes.
D’autres média ont cependant mis en évidence que les résultats des recherches étaient souvent datés et posaient des questions sur l’index Qwant (NextImpact), de sa pertinence, comme nombre d’utilisateurs ont pu en faire l’amère expérience.
Mais ce dossier ne s’arrête pas à ce mensonge sur la souveraineté réelle de ce moteur de recherche, nombre de questions émergent quant à sa structure financière et les pertes abyssales qui concernent la société Qwant.
Qwant, une escroquerie financière en plus de l’escroquerie technologique ?
Si l’escroquerie financière est avérée, elle pourrait être tout aussi néfaste au pouvoir en place que l’affaire McKinsey, même si ce n’est pas du tout un environnement financier et politique comparable.
En effet, Qwant, malgré une efficacité limitée et de nombreuses lacunes, continue de jouir d’un soutien financier de l’Etat. Qwant est soutenu par le gouvernement français (Le Libre Penseur), avec en sus une injection de capital de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) début 2017, appuyé par le ministre de l’Économie de l’époque, Emmanuel Macron.
La CDC détient actuellement 20% du capital de l’entreprise. Mais les pertes de Qwant sont abyssales au vu de sa taille. Les montants avancés pour 2017 étaient de 10 millions d’euros, puis 11,2 millions d’euro en 2018. Il est à noter qu’en mai 2020, la société n’avait toujours pas publié ses comptes 2018, dérogeant à toutes règles comptables habituelles, mais sans a priori inquiéter ni la CDC, ni le gouvernement.
En 2020, la reprise en main financière de Qwant par la CDC s’accompagne de la mise à l’écart de son PDG, Eric Léandri, en poste depuis 2016, l’un des co-fondateurs de l’entreprise, ainsi qu’un certain nombre de hauts cadres. Survient ensuite le coup de tonnerre de Mediapart qui met en lumière que Monsieur Léandri faisait jusqu’à fin 2016, l’objet d’un mandat d’arrêt européen dans le cadre d’une enquête au sujet d’une escroquerie en Belgique. Cette affaire avait déjà en soi de quoi jeter le trouble sur la gestion financière et les gabegies observées chez Qwant. Mais l’intéressé préfère évoquer un complot contre son entreprise… Comme suite à ces révélations, le combat fit rage au sein de la CDC entre les pour et les anti-Léandri. Cet épisode a surtout démontré que c’est la protection dont ce dernier bénéficiait au plus haut niveau de l’Etat qui a mené à de tels égarements.
Si l’on se réfère à l’enquête menée par Le MediaTV, les relations entre le pouvoir et Qwant posent question. Tout continue comme avant lors de la prise de fonction du nouveau secrétaire d’état au numérique, Cédric O, qui, au Vivatech 2019, apporte son soutien à Qwant. Il est à noter, car cela n’est pas anecdotique, que ce même Cedric O, était le trésorier de LREM pendant la campagne présidentielle de 2017. Existe-t-il un lien entre cette campagne et Qwant ? Quelles en sont les conséquences pour la société ? Et pour les comptes de campagne du candidat Macron ?
Ce qui est terrible, c’est que les liens troubles qui unissent Qwant et Emmanuel Macron sont connus et anciens. Alors qu’il n’est encore que ministre de l’Économie, un autre entrepreneur français propose un moteur de recherche français, Xaphir. Il s’agit d’Eric Mathieu, fondateur de la société Xilopix. A cette époque, ayant besoin de fonds, il essaie de multiplier les rendez-vous au plus haut niveau de l’Etat. Pour lui, les portes resteront closes pour aboutir à son rachat par Qwant pour une bouchée de pain, par manque de fonds.
Si au moins Qwant avait utilisé cette technologie Xilopix pour l’intégrer à son moteur ? Mais non, l’aventure Qwant n’avait pas pour objectif de créer un champion français. Dans ce cas, quels étaient les objectifs d’une telle opération ?
Si l’on en croit une plainte adressée au président de la Cours des Comptes, Pierre Moscovici, et à l’ensemble des députés par Marc Lango, fondateur de l’un des moteurs de recherche concurrent de Qwant, Premsgo.fr, les accusations sont lourdes, mais étayées, comme l’explique le pdf du dossier attaché à cet article.
Marc Lango dénonce le rôle de Qwant et il estime qu’un scandale d’Etat, où le gouvernement aurait fait montre de légèreté dans sa gestion des fonds publics de la CDC, dans cette plainte adressée à la Cours des Comptes. Le document transmis comprend 219 pages et on retrouve des éléments cités plus haut dans les différents articles parus sur le sujet Qwant.
Ce document présente des éléments financiers troublants qui corroborent les questionnements de M. Lango. Ce qui est surprenant, c’est que ce document rendu public le 27 mars 2022 n’ait pas fait l’objet d’une reprise majeure des médias. Ce, d’autant plus qu’en sus de Qwant et de ses dirigeant, il met clairement en cause des personnalités au plus haut niveau de l’Etat pour leur attitude dans ce dossier, comme Cédric O et Emmanuel Macron.
Il est donc très étonnant de constater que dans ce dossier aussi, des instances clefs, comme la Cour des Comptes, et même le parquet financier, ne se sont pas saisis du sujet.
Conclusion
Cette affaire pose de nombreuses questions auxquelles il faudra bien répondre, sur le fonctionnement de l’Etat, sur ses initiatives censées promouvoir notre souveraineté industrielle, sur la souveraineté numérique. Dans un registre différent, ce dossier rappelle l’affaire Alstom. Ce nouvel épisode, si les éléments sont avérés, permet de constater pourquoi la France a un aussi mauvais classement en termes de lutte contre la corruption.
Nous sommes à quelques jours de l’élection présidentielle de 2022, et il serait bon que ce sujet soit versé au débat public, pour se poser les bonnes questions et déterminer si la France veut en finir avec des méthodes qui rappellent de mauvaises pratiques du passé et les liens troubles entre politique et entreprises. Le nouveau monde prédit en 2017 ne serait-il qu’une chimère ?
Emmanuel MAWET